Sans que nous en ayons conscience, nos poumons se gonflent et se dégonflent plusieurs fois par minutes. Ils abritent des centaines de millions d’alvéoles, irriguées par de minuscules vaisseaux sanguins. À chaque inspiration, quelques litres d’air pénètrent à l’intérieur. Leur précieux oxygène diffuse alors dans le sang, qui évacue au passage du dioxyde de carbone. Puis, c’est l’expiration …
Ce complexe ballet nécessite l’action coordonnée de toute une série de muscles. Les poumons eux-mêmes n’en possèdent aucun, alors que le cœur est capable de se contracter seul – souvenez-vous de la scène de sacrifice d’Indiana Janes et le Temple maudit, où un gourou arrache le cœur de la victime, qui continue à palpiter dans sa main. Les poumons sont en effet de simples enveloppes fixées aux côtes. Lorsqu’on inspire, plusieurs muscles ouvrent la cage thoracique et créent un effet d’aspiration, un peu comme une pompe. Une respiration «avec la poitrine» met en jeu les muscles intercostaux externes – parfois suppléés par certains muscles du cou -, qui écartent les côtes supérieures. Quand on respire « avec le ventre », on contracte plutôt le diaphragme, qui sépare les cavités thoracique et abdominale; il appuie alors sur le contenu de l’abdomen en ouvrant les côtes basses.
À l’expiration, les poumons se dégonflent passivement, grâce à leur élasticité. Du moins en temps normal.
S’il faut accélérer ou amplifier la respiration lors d’un exercice, voire en cas de maladie, l’expiration peut devenir active: divers muscles, comme les abdominaux, se contractent alors pour fermer la cage thoracique et expulser l’air.
Comment tous ces muscles sont-ils commandés? Lors de la respiration automatique, le rythme est produit par un chef d’orchestre, le système nerveux autonome. De petits groupes de neurones situés dans le tronc cérébral, à la base du cerveau, élaborent les commandes motrices. Ces «centres respiratoires» aux noms ésotériques (le complexe pré-Bôtzlnqer et le noyau rétrotrapézoïdal) envoient des impulsions vers les neurones «relais» de la moelle épinière, qui les propagent ensuite vers les muscles. Ils sont capables de détecter des modifications du contenu du sang en oxygène et en dioxyde de carbone, et d’adapter la respiration pour rétablir l’équilibre. En conséquence, nous n’avons pas à nous en soucier, par exemple lorsque nous faisons du sport: le rythme se règle automatiquement.
Cela passe par deux voies opposées du système nerveux autonome. L’une, «ralentisseuse », est qualifiée de parasympathique. L’autre, «accélératrice », est appelée «orthosympathique », ou simplement «sympathique ». C’est elle qui déverse des flots d’adrénaline dans notre corps en cas de stress physique ou psychologique ; s’ensuit une accélération du cœur et de la respiration, une augmentation de la pression artérielle, une dilatation des bronches et des pupilles … L’activation parasympathique a quant à elle des effets relaxants sur l’organisme.
La localisation des centres respiratoires, extérieure à l’organe commandé, rend possible un phénomène extraordinaire : l’automatisme peut être contourné par des commandes nerveuses provenant de plus haut dans le cerveau, qui vont produire des actes respiratoires déconnectés des besoins de l’organisme (en termes d’apport d’oxygène ou d’élimination du dioxyde de carbone). Ces «ordres supérieurs» viennent notamment des régions dites «limbiques» (voir la figure ci-dessus), qui connectent directement le souffle à l’émotion : le rire, la peur, le plaisir sexuel le modifient par ce biais, transmettant des signaux porteurs de sens à nos congénères.
Ce sont aussi ces régions qui maintiennent la respiration sous une surveillance étroite, sonnant l’alarme en cas de problème.
Quant à la respiration volontaire, elle dépend de régions du cortex dit «supérieur»: le cortex prémoteur prépare ainsi l’action et la module, tandis que le cortex moteur primaire envoie les commandes motrices. Ce sont eux que nous mobilisons lorsque nous effectuons un exercice respiratoire ou que nous parlons. Quand la respiration est difficile à cause d’une maladie, ils viennent aussi à la rescousse du contrôle automatique.
500000000 D’ALVÉOLES MINUSCULES assurent les échanges gazeux entre l’air et le sang dans nos poumons. La surface d’échange équivaut à la moitié d’un court de tennis!
Source: C. Del Negro etai., Brcathing matters.Nacure reuiews, 2018
Plusieurs zones cérébrales impliquées dans les émotions et la conscience de soi (en jaune) reçoivent en permanence des informations provenant de l’appareil respiratoire. C’est en partie pour cela que la respiration a un tel pouvoir sur nous. Ces régions sont aussi capables d’influencer notre souffle pour en faire un instrument de communication implicite, à travers, par exemple, des soupirs d’exaspération ou de plaisir.
SlIrle Web
Site de la fondation du souffle: www.lesouffle.org
Découvrez le Dossier Complet – Les Pouvoirs de la Respiration
Magazine Cerveau & Psychos – N° 103 – Octobre 2018